Le Pourpre Han – BaCuSi2O6
Ou comment DBA me conduit à m’intéresser ET à l’Histoire de l’Art ET à la Chimie. Deux disciplines qui me sont plus qu’étrangères. Honnies serait plutôt le bon qualificatif… D’ailleurs, à propos d’histoire de l’art, il faut que je finisse cet autre article sur “Le Triomphe de Scipion”. On verra cela plus tard, pour l’instant, un peu de “chimie”…
Tout commence par la lecture d’une revue sur le thème de l’histoire il y a trois semaines. Abordant comme dossier central la Mésopotamie, j’achète le magazine pour survoler ce sujet que je connais vraiment mal. Si le dossier n’est pas très consistant, un article de deux pages présente l’exposition de l’armée Terracotta. Cette exposition promène environ 250 pièces dont 150 reproductions en argile de l’armée de terre cuite réalisées sur commande d’un riche mécène et selon les techniques d’origine.
L’armée Terracotta ?
QIN, un mégalomane qui met fin à la période des Royaumes Combattants
Mais voilà, cette armée de terre cuite fut l’œuvre du premier Empereur chinois une fois qu’il se fut affublé de ce titre et tirant sa légitimité d’avoir mis fin à la période des Royaumes Combattants en amenant au calme forcé ses voisins et en promulguant des réformes qui ont permis d’harmoniser administrativement la “Région”. Alors voilà, ceux qui suivent un peu et savent que je travaille sur la sortie d’un supplément de campagne DBA sur le sujet ne seront pas (ou peu) surpris : apprenant que l’exposition actuellement à Liège ferme ses portes le 24 avril prochain (2017 donc), ni une ni deux, location de voiture, préparation des appareils numériques car c’est l’occasion unique de prendre de chouettes photos libre de droits pour une prochaine publication tout en allant s’imprégner de l’ambiance de l’époque avec cette exposition.
De jolies photos…
L’exposition en elle-même est plutôt bien faite sauf peut-être la fin qui présente de très jolies tenues chinoises mais pas du tout contemporaines de la période concernée. Il est vrai qu’on a à ce jour aucun reste des étoffes de l’époque (on parle de -221 à -210 pour ceux qui ont suivi). L’exposition est plutôt bien faite. Elle démarre par un film qui dure environ 10 mn. Ce film est un vrai régal pour les amateurs de DBA. Une carte sert de toile de fond pour présenter la montée en puissance de QIN parmi les autres royaumes combattants et des reconstitutions dynamiques mettent en scène des combattants et les matériels – dont les chars – qui donnent envie de retourner de suite à ses palettes de couleurs.
On aborde ensuite la présentation du site avec les différents espaces qui composent ces 56 km². La carte reproduite ci-dessus (piquée ici) ne reprend pas tous les ensembles dont le cimetière des bâtisseurs de ce mausolée ou encore l’aire d’assemblage et de cuisson des statues. Viennent alors des présentations d’armes. Mes photos sont très mauvaises mais on peut y voir des haches-poignards (de dagger-axes qui a été traduit par lance-hache par l’exposition mais ce n’est pas le terme habituellement retenu) et les arbalètes, leur mécanisme et les carreaux qu’elles propulsaient et même des carquois métalliques.Enfin, on aborde ce qui image et fait la renommée du site, les statues d’argiles. Des détails techniques sont donnés mais on peut les retrouver facilement sur le web.
Pour les vêtir ces statues, une foultitude de carreaux de céramiques liés par des entrelacs de laiton ont été retrouvé. La reconstitution de la photo ci-contre a été permis car les pièces originales sont numérotées. Les combattants de l’époque ne portaient pas d’armure en cette matière car, outre le poids, elles résisteraient mal aux chocs des combats. Par contre, on les retrouvent intégrées au moulage de certaines statues et le détail de la photo nous donne un aperçu de ce à quoi elles ressemblaient mais en remplaçant la céramique par des pièces de cuir.
La reproduction des pièces présentées était vraiment impressionnante, très proche des photos que j’avais pu voir avant de venir. N’oubliez pas de cliquer sur les photos pour les afficher en plus grand !
…Mais la chimie revient me draguer !
Fatalement, j’ai appris pas mal de choses même si j’avais un peu bossé le sujet avant de venir. Je savais qu’aucune statue n’est identique et que l’on pense que les ouvriers de ce gigantesque chantier on servi de modèle pour les têtes des soldats du rang. Par exemple, j’ignorais que la coiffe était une indication du rang du combattant. Mais ce qui m’a le plus marqué dans cette exposition, c’est la problématique des couleurs.Tout d’abord, un des soucis des archéologues est que le liant entre l’argile et le pigment de couleur réagit très vite au contact de l’oxygène. Le résultat en est catastrophique : entrant en réaction avec l’air, il se contracte et les aplats de couleur sont instantanément réduits en miettes et tombent. Actuellement, des recherches sont menées pour trouver une solution à ce problème et aucune nouvelle statue n’est exhumée afin de conserver le matériaux intact jusqu’à ce qu’on ait une solution.
L’autre fait que je trouve marquant est que toutes les couleurs se trouvent naturellement. Toutes sauf une. On l’appelle le Pourpre Han. Sa formule est donc le BaCuSi2O6. Notons la proximité avec le bleu qui est BaCuSi2O10. La formule de ce pourpre est donc le résultat d’une synthèse produite par l’homme. Et la particularité de cette couleur est qu’elle aurait la même composition chimique que celle du pourpre bleu égyptien ! L’hypothèse avancée par l’exposition (qui doit donc dériver du travail de chercheurs mais qui ne sont pas cités) est que cette transmission de couleur est un témoignage des échanges via la route de la Soie qui aurait permis à la Chine d’acquérir cette connaissance. Malheureusement, un article (lire Ici !) anéantit cette hypothèse. Dommage, il y a donc quelques inexactitudes dans la présentation de l’exposition.La photo prise rend très mal compte de la beauté de cette couleur très électrique et vive. Bon, mais il y a quand même un soucis. Pour moi, le pourpre, c’est une couleur qui tire sur les rouges façon bordeaux qui flashe un peu.
Le Pourpre
Les bonheurs de la langue encore une fois. Si le mot pourpre désigne habituellement le truc rougâtre que je décris ci-dessus, c’est une approximation. En fait, sont pourpres les couleurs à base de mélange de rouge et de bleu et complémentaires des verts qui ne peuvent être reconstituées par le mélange d’une lumière blanche et d’un seule lumière monochromatique. Ceci explique donc que l’arc en ciel ne comporte pas de pourpre et qu’il existe bien deux pourpres : un tendant vers les bleus, l’autre vers les rouges.
Mais, pour comprendre comment est fabriqué ce pourpre, je tombe sur un autre article (que je vous laisse découvrir Là). Et là, j’apprends que cette composition chimique si difficile à obtenir possède des qualités physiques particulières. Et, notamment, dans des conditions de température très froides(proche du zéro absolu), cette molécule perd une dimension. Oui, vous avez bien lu, elle perd une dimension. Elle passe de la 3D à la 2D. Et que son état passe à un Condensat de Bose-Einstein !Ok, je fais le malin, mais dans les faits je ne sais pas vraiment ce qu’est ce Condensat qui a tant de propriétés en physique quantique. Si j’ai bien compris ce que j’ai lu, il s’agit d’un état particulier prédit par Einstein et prouvé expérimentalement par Bose qui fait que les atomes concernés ont tendance à “s’aligner” et prendre un état d’énergie très faible qui donne des caractéristiques physiques à la bête si spécifique que ce Condensat correspond à un état particulier comme on avait déjà les gaz, les liquides et les solides.
Bref, c’était une exposition très sympa qui m’a permis de chercher plein de choses grâce à mon moteur de recherche favori et ce, en bonus des photos que je suis allé faire. Alors, histoire de vous donner du grain à moudre et parce que peut-être vous comprendrez mieux que moi, je vous invite à aller lire ce qu’est ce Condensat de Bose-Einstein !
Cassandre,
Le 18 avril 2017